Quand un pêcheur sénégalais grimpe dans une pirogue de nos jours, il n’est pas rare que ce soit la dernière fois, soit parce qu’il part chercher une nouvelle vie en Europe, soit parce que le voyage tourne mal.
A Thiaroye, dans la banlieue de Dakar, des dizaines de pirogues tirées sur le rivage ont été abandonnées par des travailleurs de la mer, qui ont pris la route de l’Europe “parce que le poisson est devenu trop rare et qu’ils n’arrivent plus à subvenir à leurs besoins”, assure Ibrahima Diouf, solide pêcheur d’une quarantaine d’années.
“Tous les jeunes qui sont derrière moi ne discutent que d’aller en Europe quand nous sommes en mer”, dit-il en désignant les six hommes vigoureux qui préparent son embarcation avant de sortir pêcher.
Depuis des années, des milliers de Sénégalais s’embarquent clandestinement sur des pirogues en bois qui peuvent atteindre une vingtaine de mètres et transporter des dizaines de passagers.
Il en coûte quelques centaines de milliers de francs CFA (1.000 FCFA = 1,5 EUR) par tête, laissés à un passeur. Ils défient les dangers d’une traversée d’environ 1.500 kilomètres pour atteindre l’archipel espagnol des Canaries, débarcadère de l’Union européenne au bout de sept ou dix jours de navigation.
Le mouvement est devenu massif.
Il passe à peine un jour sans que ne soit rapporté au Sénégal une arrivée aux Canaries, une interception, ou un naufrage. Différents interlocuteurs disent que beaucoup de ces migrants sont des pêcheurs ou des habitants des localités qui jalonnent les centaines de kilomètres de côtes sénégalaises et qui dépendent fortement de la pêche.
Ces communautés paient le prix de la raréfaction du poisson, sous l’effet de la surpêche, de la concurrence des armements industriels, de la pêche illégale et … la suite sur Seneweb